Je vous invite à découvrir la tribune de Monique PELLETIER publiée dans le journal Le MONDE du vendredi 11 Janvier. (ICI)
Ouverture et diversité... Mots nouveaux dans le langage politique, mots magiques qui devraient mettre fin à l'uniformité des élites. Finis les gouvernements... de hauts fonctionnaires, ainsi que les promotions de la Légion d'honneur qui, jusqu'alors, leur étaient principalement réservées ! L'action publique sera désormais conduite par des hommes et des femmes dont l'origine ethnique, l'âge, le milieu social et l'expérience refléteront la réalité variée de la population française.
Ouverture et diversité... Les candidats aux élections municipales sont invités à appliquer ce principe dans la constitution de leurs listes. Malheureusement, il y a, dans ce bel élan, de grands oubliés : les personnes handicapées. Elles sont 5 millions et font encore partie, en France, des exclus.
Pas une fois elles n'ont été évoquées dans les discours sur la diversité. Pas une fois il n'a été dit que la plupart d'entre elles sont tout à fait aptes à assumer une mission publique et que leur différence, loin d'être un obstacle, peut devenir un atout.
Une enquête, effectuée par téléphone entre le 26 novembre et le 7 décembre 2007 par notre association, révèle que, dans les 36 villes de plus de 100 000 habitants, sur 2 421 conseillers municipaux, adjoints ou maires, on ne compte que 7 personnes handicapées (3 UMP, 3 socialistes et 1 RDSE, le groupe Rassemblement démocratique et social européen du Sénat). Soit 0,4 % de personnes handicapées au sein des municipalités des 36 plus grandes villes. Ce constat est réellement consternant. Est-ce l'ignorance de ce qu'est une personne handicapée ou la peur de leur différence qui a ainsi, au fil des ans, conduit les personnes valides à maintenir à l'écart celles qui souffrent d'un handicap ?
On constate des progrès réels, mais insuffisants, dans l'insertion à l'école ordinaire ainsi que dans les entreprises, mais pas dans la place qui leur est accordée dans la vie de la cité. Pour réaliser leur rêve, qui est de vivre comme les autres et avec les autres, les personnes handicapées font preuve plus que d'autres de courage, de compétence et de dévouement.
Le courage : il leur faut mener un combat quotidien pour faire face à leurs propres difficultés et les maîtriser... Je pense au non-voyant qui vit seul et circule seul en ville. Je pense au paraplégique qui se heurte aux mille et un obstacles de l'inaccessibilité des bâtiments publics et privés. En les évoquant, je pense à tous les autres dont le courage force l'admiration.
La compétence : qui, mieux qu'une personne handicapée, connaît, dans sa ville, les obstacles et les manques ? Sa présence dans une municipalité garantit l'attention qui sera portée au handicap.
Le dévouement : il est assuré. Etre élu est si rare pour une personne handicapée qu'elle y consacrera plus de temps et plus d'énergie que les autres.
Les candidats ont encore le temps de placer sur leur liste une personne handicapée. On entendra, comme cela a été trop longtemps le cas pour les femmes, "on ne trouve pas de candidats handicapés". Les milliers d'associations qui se consacrent au handicap sont prêtes à présenter de bons, de très bons candidats.
Le Conseil national handicap, dont l'objectif majeur est de changer le regard et le comportement des valides sur le handicap, entend saisir l'occasion des élections municipales pour rappeler l'urgence et l'importance de l'insertion des personnes handicapées dans tous les rouages de la vie sociale, économique et politique de notre pays.
C'est de justice et d'équilibre social qu'il s'agit, mais c'est aussi une chance à saisir.
Monique Pelletier est présidente du Conseil national handicap, ancienne ministre, avocat à la Cour.